Deux poèmes
Lors de l'atelier d'écriture que j'ai animé à Brest fin octobre, la consigne était d'écrire un poème en s'inspirant du premier vers de poèmes existants. On avait proposé six débuts (Baudelaire, Verlaine, Rimbaud, Apollinaire, Aragaon, Prévert). Voici deux poèmes que j'ai moi-même composés, l'un à partir des premiers vers de Colloque sentimental de Verlaine ('Dans le vieux parc solitaire et glacé, deux formes ont tout à l'heure passé'), l'autre à partir du premier vers de Nuit rhénane d'Apollinaire ('Mon verre est plein d'un vin trembleur comme une flamme').
Inséparables
Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux formes ont tout à l’heure passé
L’une lumineuse dans son halo d’argent
L’autre, ombre dans son ombre, guettant
Elles ont passé, et leur présence, furtive
Dans les yeux et les cœurs ravive
Une douleur ancienne à peine enfouie
Un cri perçant, une saillie
Voici la vie qui éblouit chacun
Grandiose comme au premier matin
Mais juste derrière à chacun de ses pas
Elle la suit, sa sœur le trépas
Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux formes ont tout à l’heure passé
Ivresse
Mon verre est plein d’un vin trembleur comme une flamme
Il réchauffe mon sang et réchauffe mon âme
Il me fait don d’ivresse, il éclaire mon chemin
Mais ils sont éphémères, c’est là et puis plus rien
Mon verre est plein d’un vin charmeur comme une femme
Il fait vibrer mes sens et ouvre tous les sésame
Il me rend beau parleur séducteur et coquin
Mais si j’y suis fidèle, j’en veux toujours plus d’un
Mon verre est plein d’un vin trompeur comme un démon
Il me promet la lune, des merveilles et des monts
Je crois être tout puissant, régner sur l’univers
Mais je ne fais que sombrer, chuter au fond du verre
Mon verre est plein d’un vin moqueur comme un garçon
Je ris de moi, des autres, oublie les bonnes façons
Retrouve la liberté, fais tomber les barrières
Mais comme le bambin finis sur le derrière
Mon verre est plein d’un vin léger comme une brise
Il rafraîchit le corps et l’esprit il le grise
Un vent de nouveauté, d’amour, de liberté
Je sais ses déguisements et veux m’y adonner